Au cœur d’une bataille juridique qui aura duré près d’une décennie, l’homonyme de Mohamed Merah, le tristement célèbre terroriste responsable des attaques de mars 2012, vient de gagner en cassation contre M6. En cause : une erreur malencontreuse de la chaîne, qui avait diffusé la photo de l’homme dans un reportage après les attentats de Toulouse et Montauban. Plus d’infos dans la suite !
Au cœur d’une bataille juridique à rebondissements
En octobre 2017, le Tribunal de Grande Instance de Douai juge que M6 et la société de production Tony Comiti ont bel et bien porté atteinte au droit à l’image de Mohamed Merah. Cette décision condamne les deux parties à verser 10 000 € de dommages et intérêts, assortis de 3 000 € de frais judiciaires. En réaction, la défense décide de faire appel. Objectif : tenter de requalifier le préjudice en diffamation.
Cette requalification, si elle avait été acceptée, aurait invalidé la plainte de Mohamed Merah. Pourquoi ? Pour la simple raison qu’une plainte pour diffamation doit, légalement, être déposée dans les trois mois suivants les faits. C’est donc sur ce point que s’est focalisé le recours en appel. En juin 2019, la cour d’appel de Douai valide cette requalification, ce qui incite Mohamed Merah à se pourvoir en cassation.
C’est là que le vent tourne. Au printemps suivant, la Cour de cassation de Paris annule la décision de la cour d’appel de Douai et condamne M6 et Productions Tony Comiti à verser à l’homonyme du terroriste une indemnité de 3 000 €. Dans son arrêt rendu le 8 avril, la Cour explique que « la diffamation visant une personne ne peut rejaillir sur une autre que dans la mesure où les imputations diffamatoires lui sont personnellement destinées (…) la publication du nom et du visage d’un homonyme de la personne diffamée ne suffit pas à faire rejaillir cette diffamation ».
Le cas Mohamed Merah peut paraître isolé, mais en vérité, il existe beaucoup d’anonymes homonymes de personnes plus ou moins célèbres (comme l’avocat Marc Ladreit de Lacharrière, homonyme de l’homme d’affaire par exemple…). Ils ont simplement la chance de ne pas être l’homonyme d’un terroriste…
Un parcours judiciaire tumultueux
L’origine de cette affaire remonte à une photo diffusée sur Facebook. Le 1er avril 2012, deux semaines seulement après les attentats de Toulouse et Montauban, M6 choisit dans son magazine « 66 minutes » de présenter « L’énigme Mohamed Merah », en utilisant une photo Facebook clairement identifiable de l’homonyme du terroriste. Comme le souligne l’ancien avocat du plaignant, Maître Bussy, dans une interview accordée au magazine Capital, « L’image de mon client a circulé à travers le monde sur Internet. Reprise par tous les médias internationaux jusqu’en Chine, mon client a été contraint de se réfugier chez sa mère pendant plusieurs semaines ».
En novembre 2013, l’homme en question réclame des dommages et intérêts à la société éditrice de M6 et à la société de production responsable du reportage. Aux dires de Mohamed Merah, rapportés dans le verdict du 13 juin 2019 de la cour d’appel de Douai, le plaignant déplorait alors une « atteinte à sa réputation » suite à la diffusion du reportage. D’après lui, cette diffusion a littéralement « mis un terme à sa carrière professionnelle », sans même mentionner les insultes et menaces reçues sur Facebook suite à la diffusion du reportage.