Maître Charlotte Bellet, avocate dédiée à la cause des franchisés depuis 1995 et associée du cabinet Bourgeon Guillin Bellet & Associés (BMGB), a lancé, aux côtés de son associé Rodolphe Perrier en 2017, une initiative pionnière : le label « Franchise Equitable ». Objectif annoncé : garantir une relation plus juste et transparente entre franchiseurs et franchisés, rien que ça ! Mais quels sont les rouages du concept « Franchise Equitable » ? Plus important encore, quels sont les erreurs à éviter et les précautions qui s’imposent avant de signer au bas d’une convention de franchise ? Eléments de réponse !
« Franchise Equitable », le concept qui entend rééquilibrer le jeu dans la franchise
Né de la vision de Rodolphe Perrier et Charlotte Bellet, le concept de « Franchise Equitable » entend révolutionner le monde de la franchise. Comment ? En instaurant des principes de transparence et d’équité entre franchiseurs et franchisés ! En effet, l’initiative vise à établir un partenariat plus juste, où la balance commerciale et juridique penche de manière équilibrée des deux côtés. En adhérant à ce label, les franchiseurs s’engagent à une transparence totale, allant au-delà des exigences de la loi, pour offrir une vision claire et fiable de la rentabilité et des perspectives du réseau.
Au cœur du concept, une conviction : l’accès à une information complète et précise sur les performances du réseau et sa croissance est indispensable pour que les candidats puissent évaluer de manière éclairée l’opportunité avant de s’engager ! D’un point de vue pratique, ceci implique une divulgation détaillée des chiffres d’affaires réalisés par les franchisés tout au long de leur activité et un aperçu de l’évolution du réseau depuis sa création.
Le label met également un point d’honneur à respecter l’équité contractuelle, notamment en ce qui concerne la durée des contrats, alignée sur celle des engagements financiers des franchisés, tels que les prêts bancaires et les baux commerciaux. Il prend position contre les clauses pouvant créer un déséquilibre significatif, comme celles imposant une solidarité ou une caution personnelle du franchisé, qui pourraient mettre en péril son patrimoine personnel sans justification valable.
La lutte contre les clauses de non-concurrence et de non-affiliation post-contractuelles, qui menacent la survie de l’entreprise du franchisé après la fin du contrat, est également au centre des engagements du label. De même, le label rejette les clauses de préemption et d’agrément déséquilibrées, ainsi que celles conduisant à une résolution des litiges par un tribunal arbitral coûteux, inaccessibles pour les petites entreprises.
Les incontournables d’une due diligence avant de s’engager dans la franchise
Lorsque vous envisagez de rejoindre le réseau d’une franchise, l’enthousiasme initial doit rapidement laisser place à une démarche d’analyse et de réflexion. Attention donc à ne pas succomber aux promesses et autres perspectives séduisantes présentées lors des premières rencontres… Car comme dans tout engagement majeur, la précipitation est l’ennemie de la décision éclairée !
Vous l’aurez donc compris, une démarche de due diligence s’impose, et elle englobe plusieurs aspects qui détermineront la viabilité et la pérennité de son investissement dans le réseau. A ce niveau, tout commence par un examen du franchiseur, sous tous les angles ! Au programme donc : historique, ressources matérielles, humaines et financières… Par-dessus tout, il est essentiel de confirmer l’existence concrète d’un savoir-faire distinctif, appuyé par une équipe d’animateurs capables d’assurer un accompagnement réel des franchisés. L’accès à des outils et logiciels performants, conjointement à la présence d’un site internet de qualité, complète le tableau des prérequis à vérifier.
On ne le dira jamais assez, toutes les informations transmises doivent être passées au crible. Et à ce niveau, gardez à l’esprit que l’intervention d’un expert-comptable pour examiner les bilans du franchiseur peut vous éviter bien des écueils, notamment en appréciant sa santé financière et sa viabilité à long terme. Ce n’est qu’après une analyse financière approfondie que le potentiel de rentabilité de la franchise peut être réellement appréhendé.
Tout cela est bien beau, mais sachez que rien ne remplacer l’expérience directe, car rencontrer les franchisés et évaluer leur satisfaction, visiter leurs établissements et s’imprégner de l’atmosphère du réseau offrent une perspective réelle sur le fonctionnement quotidien de la franchise. Ces rencontres sont l’occasion d’échanges francs et directs, outrepassant les discours commerciaux. Par ailleurs, ces étapes doivent idéalement être entreprises dès la réception du Document d’Information Précontractuelle (DIP), du projet de contrat, et de la liste des franchisés actuels du réseau. Encore une fois, l’accompagnement par des professionnels, tels qu’un avocat et un expert-comptable, est vivement recommandé !
Quid des perspectives futures de la franchise ?
La franchise est un système de partenariat qui a prouvé son efficacité et sa pertinence économique, mais il se trouve aujourd’hui à un tournant : « La franchise est un système aussi intéressant que porteur quand il fonctionne, c’est-à-dire lorsque le partenariat entre franchiseur et franchisés est équilibré d’un point de vue juridique et économique », souligne Maître Charlotte Bellet. Pour autant, les mutations actuelles du marché posent de sérieuses questions quant à l’avenir de ce modèle.
Une des préoccupations majeures réside dans l’évolution de la vision des franchiseurs, notamment ceux qui, « dès la création » de leur réseau, envisagent une revente, changeant ainsi potentiellement la donne pour les franchisés en termes de stratégies et de ressources. Ce phénomène pourrait altérer profondément la dynamique et la stabilité des réseaux de franchise. Par ailleurs, le commerce en ligne, avec son ascension fulgurante, représente un double tranchant. « Dans les deux à trois prochaines années, nous allons véritablement mesurer les répercussions négatives, voire dramatiques, de l’essor du commerce en ligne sur les magasins franchisés », prédit Charlotte Bellet. La concurrence entre les sites marchands des franchiseurs et les points de vente franchisés sur leurs propres territoires soulève un défi majeur, qui impacte directement la fréquentation et le chiffre d’affaires des magasins franchisés.
Face à ces défis, la solution consisterait en une répartition équitable du chiffre d’affaires généré par les ventes en ligne, sur une base géographique, afin que chaque franchisé bénéficie de manière juste des recettes issues de son territoire. Toutefois, « les franchisés qui me contactent ne profitent malheureusement pas de cette répartition du chiffre d’affaires », déplore l’avocate, pointant du doigt un manque de transparence de certains franchiseurs. Elle révèle avoir traité un cas où il a été démontré qu’un franchiseur détournait « 70 % des recettes qui devaient revenir » aux franchisés !
Il est donc impératif d’intégrer au sein des réseaux de franchise des mécanismes de contrôle efficaces, permettant de garantir que la totalité du chiffre d’affaires en ligne bénéficie équitablement à tous les membres du réseau. Cette mesure, centrale pour l’avenir de la franchise, nécessite un engagement réciproque des franchiseurs et des franchisés vers plus d’équité et de transparence. « Je suis donc convaincue que la franchise peut avoir un magnifique avenir devant elle », affirme Maître Bellet, non sans optimisme, conditionné toutefois à l’élimination des abus et à l’adoption d’un modèle de gestion équitable, incarné par le label « Franchise Équitable » !