La Cour de cassation a récemment rendu un jugement concernant la cession d’un office notarial, une cession qui soulève des questions importantes sur la conformité des contrats à l’ordre public. Le cas concerne un notaire qui a été nommé pour créer un office dans une zone d’installation libre suite à un tirage au sort. Seul bémol : ce notaire n’avait visiblement pas l’intention réelle de s’installer et a donc cédé son droit de présentation pour un euro symbolique à un autre notaire qui n’avait pas obtenu un rang suffisant lors du tirage au sort. Plus de détails sur cette affaire avec Frédéric Ducourau.
Contexte : une cession contestée
Un notaire nommé pour la création d’un office dans une zone d’installation libre cède son droit de présentation pour un prix symbolique de 1 € à un autre notaire. Sans surprise, cette action, qui va à l’encontre des règles de départage entre les candidats à la nomination sur un office notarial nouvellement créé, a suscité de vives réactions. En effet, cette cession est considérée comme illicite au regard de l’article 1162 du code civil. Plus globalement, cette affaire a eu le don de mettre en lumière une problématique plus large, liée à la conformité d’un contrat à l’ordre public.
Dans le détail, le notaire cédant avait obtenu l’opportunité de créer un office notarial à Paris suite à un tirage au sort. Cela dit, ce dernier n’avait pas l’intention réelle de s’installer. Ainsi, il a cédé son droit de présentation à un notaire déjà en exercice, mais qui n’avait pas obtenu un rang suffisant pour postuler à la reprise de cet office. Le ministère de la Justice, n’ayant pas donné suite à la demande du cessionnaire, cette dernière a saisi le Tribunal administratif de Paris pour obtenir l’annulation de la décision implicite de rejet.
La légalité du contrat remise en question
Le litige portait sur la légalité de la cession du droit de présentation pour un prix symbolique dans le but d’accéder à la titularité d’un office notarial nouvellement créé. Le Tribunal judiciaire de Paris, après avoir statué sur la question, a déclaré la cession illicite, contraire à l’article 1162 du code civil, entraînant la nullité du traité de cession. Ce jugement a été confirmé par la Cour de cassation, malgré le pourvoi du cessionnaire.
Par ailleurs, le cessionnaire a tenté de contester la représentation du ministère de la Justice par un avocat, en invoquant une violation de l’article 5 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019. Cette tentative a été repoussée par la Cour de cassation, qui a jugé recevables les conclusions du ministre de la Justice.
Un acte en contradiction avec l’ordre public
La Cour de cassation, dans son jugement, a rappelé l’importance des règles mises en place par la loi « Macron » pour le notariat, qui a instauré un principe de « liberté d’installation » pour renforcer la proximité ou l’offre de services. Elle a également souligné que les candidats à la nomination d’un office notarial sont départagés par tirage au sort si le nombre de demandes excède les recommandations pour une même zone. Dans cette affaire, les juges ont considéré que la cession du droit de présentation à un prix symbolique de 1 €, permettant à un notaire évincé par le tirage au sort d’accéder à la titularité de l’office nouvellement créé, allait à l’encontre des règles d’ordre public. La Cour a donc conclu que le contrat de cession, qui contrevenait à l’ordre public, était nul. Cela signifie que la cession du droit de présentation pour 1 € ne serait pas reconnue, et que l’office notarial ne passerait pas aux mains du notaire qui avait été initialement évincé par le tirage au sort.